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Dossier : Vers la métropole savante ?
mai 2014 – 84 pages

CaMBo #5

Éditorial du n°5 de CaMBo, par Jean-Marc Offner, directeur général de l’a-urba

Sérendipité… Le mot est à la mode, dans les milieux universitaires français depuis quelques années, dans les rues de New York depuis quelques décennies. Pédant ou poétique, le lecteur jugera, ce néologisme a en fait une longue histoire. Un écrivain anglais du XVIIIe siècle, Horace Walpole, forge le terme serendipity à la lecture d’une œuvre du poète persan Dehlavi, qui narre Les pérégrinations des trois fils de Serendip, au XIVe siècle.
Ce vocable désigne la capacité à tirer profit de situations inopinées, la faculté de faire des trouvailles par hasard. Il est donc question de découverte accidentelle mais aussi de sagacité, d’état d’esprit créatif, d’aptitude à exploiter l’inattendu. Surfer sur le web, parcourir les rayons d’une librairie, déambuler dans une brocante, constituent des activités à forte sérendipité : observation d’une donnée inhabituelle propice à l’imagination, rapprochement fortuit entre deux sujets. Cafés et machines à café sont également de hauts lieux de sérendipité, où s’hybrident les compétences pour de nouvelles aventures et inventions.
La sérendipité intéresse les urbanistes, car l’imprévu trouve son meilleur terreau dans la grande ville. Dès le début du XXe siècle, le sociologue allemand Georg Simmel étudiait les rapports entre « les grandes villes et la vie de l’esprit », parlant d’urbanité et de mutuelle étrangeté. Avec d’autres mots, d’autres penseurs de la ville expliquent que les métropoles favorisent mieux que tout autre agencement spatial le hasard des rencontres. C’est le « merveilleux quotidien » des surréalistes, le « liquide amniotique » des situationnistes, le « plancton relationnel » (Georges Amar) des observateurs du transport collectif, les « interactions multisensorielles aléatoires de contact » (Jacques Lévy) des géographes.
L’espace public, par l’exposition à l’altérité et à la diversité, représente alors un booster de créativité. Ainsi, la métropole – lorsqu’elle sait se faire campus – abrite l’innovation, qui se nourrit du brassage et de l’aléatoire des rencontres, de la mobilisation de ressources hétérogènes. C’est l’un des enjeux majeurs de la « métropole savante », statut auquel Bordeaux peut aspirer à condition d’amplifier les liens entre mondes universitaires et urbains : des relations institutionnelles à renforcer, des stratégies territoriales à partager, des synergies fonctionnelles à développer, des porosités spatiales à inventer.
Les liens faibles font la force de la ville. André Breton l’exprimait en poète : « La rue, que je croyais capable de livrer à ma vie ses surprenants détours, la rue avec ses inquiétudes et ses regards, était mon véritable élément : j’y prenais comme nulle part ailleurs le vent de l’éventuel. » Dès lors, le piéton devient héros métropolitain, garant de l’efficacité productive de la ville. Éventuellement aidé – à certains moments et dans certains espaces – d’un vélo, d’un tramway ou d’une voiture, il est l’acteur urbain le mieux à même de concrétiser l’ambition qui a poussé les hommes à construire les villes : intensifier les interactions entre les individus.

/ Extraits

Voir le sommaire

Voir le Grand Entretien : Cynthia Fleury (par Françoise Taliano-des-Garets)

Voir la rubrique Mémoire : la ville dans la nature, la nature dans la ville (par Emmanuelle Bonneau)

Voir l’introduction du dossier Vers la métropole savante ? (par Guillaume Pouyanne et Camille Uri)

Editeur : Le Festin, Bordeaux

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