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Dossier : Secrets d’une ville d ‘eau
novembre 2014 – 84 pages

CaMBo #6

Éditorial du n°6 de CaMBo, par Jean-Marc Offner, directeur général de l’a-urba

Autarcie ! À l’heure de la connexion numérique généralisée, le plus grand bonheur semble être dans l’autosuffisance : mon énergie (avec mes panneaux solaires), mon eau (de récupération ou de captage), mes plans de tomates… Aristote n’aurait pas dit mieux, qui ne concevait la cité que dans l’autarcie et la béatitude dans la non-dépendance.
Le rêve de l’autonomie énergétique ne date pas d’aujourd’hui. En 1958 déjà, Yona Friedman voulait « libérer l’habitation de ses réseaux ». Le premier choc pétrolier de 1973 a ravivé cette utopie architecturale de la maison autonome, versions retour à la nature ou expérimentations high-tech. Ces velléités de débranchement s’élargissent désormais. Les circuits courts et la proximité comme réponses à la puissance des firmes mondialisées et à l’envahissement technologique ? Le local (ressources vivrières, énergies renouvelables…) contre le global ? Et la frugalité vertueuse en prime ?
D’un point de vue macro-économique, l’intérêt autarcique ne va pas de soi. Les bonnes vieilles économies d’échelle et d’envergure militent encore pour la division spatiale du travail et l’interconnexion des réseaux. Les marchés n’ont pas tous la même taille, heureusement pour les crus bordelais d’ailleurs. Et l’analyse de l’empreinte environnementale des systèmes de production révèle souvent des surprises. Ainsi, le fret ferroviaire réclame une massification des flux que la proximité est bien en peine de faciliter.
Mais la tendance séculaire à plus d’interdépendance, entre les populations, entre les territoires, se heurte désormais à une méfiance explicite. D’où vient ce que je mange ? L’eau n’est-elle pas polluée ? Ma source d’approvisionnement énergétique est-elle écoresponsable ? Que me veut ce numéro de téléphone que je ne connais pas ? Auparavant expressions de la solidarité, les maillages deviennent synonymes de sujétion aveugle.
Les systèmes techniques méritent certes des évaluations socio-économiques poussées. Les entreprises de services en réseau doivent être régulées. Mais des évolutions plus globales se jouent dans ces remises en cause.
La peur du branchement amène le refus des interdépendances, en convergence avec une tendance lourde de la société : l’entre soi. Les enclaves résidentielles comme la privatisation de l’espace public fabriquent un urbanisme de l’évitement, loin du projet générique de l’urbanité : s’accommoder de l’autre, dans ses différences.
Faut-il à ce point craindre ceux avec lesquels nous commerçons, proches ou lointains, pour s’inquiéter d’une autosuffisance alimentaire de la communauté urbaine de Bordeaux réduite à un ou deux jours ? Il y a mille bonnes raisons de valoriser l’agriculture périurbaine et de développer les jardins partagés. Le « se suffire à soi-même », en revanche, porte une ambiguïté délétère, loin des valeurs du cosmopolitisme chères à la tradition bordelaise.

/ Extraits

Voir le sommaire

Voir le Grand Entretien :  Pierre Veltz (par Nathanaël Fournier)

Voir l’introduction du dossier : Secrets d’une ville d’eau (par Vincent Schoenmakers et Sandrine Vaucelle)

Editeur : Le Festin, Bordeaux

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